Cette dernière met à plat les tenants et les aboutissants d’une crise multidimensionnelle. Elle révèle, également, les enjeux sanitaires, économiques, sociaux et géopolitiques auxquels le pays doit faire face sur le court et le moyen terme, tout en proposant les éléments d’un plan urgent de sortie de crise.
Les trois phases de la stratégie
Afin d’éviter de basculer dans l’inconnu en gérant les conséquences au jour le jour dans l’urgence, l’ITES propose une étude qui met en exergue des axes stratégiques sur lesquels doivent se pencher toutes les parties prenantes impliquées dans la lutte contre le coronavirus. Elle s’articule autour de trois principales phases :
1- adopter l’économie de guerre dans l’objectif de préserver les secteurs vitaux du pays qui sont le cœur du système ou “réacteur Tunisie”,
2- une phase d’anticipation qui s’étale de l’été à la fin de l’année 2020 où il est question d’anticiper la fin de la crise sanitaire et d’assurer le redémarrage de l’économie nationale.
3- penser l’après-Covid-19 et identifier les horizons stratégiques qui s’offrent au pays à l’horizon 2025.
L’économie de guerre
Son principal enjeu est d’identifier et de préserver les secteurs vitaux qui sont les activités économiques indispensables et vitales pour la survie de la nation.
Durant cette phase, il est crucial de contenir tous les risques et les menaces qui peuvent surgir comme l’effondrement de l’Etat ou de l’économie nationale, une implosion sociale difficilement maîtrisable, outre les risques sécuritaires et géopolitiques, essentiellement le terrorisme, la criminalité, la spéculation, le crime organisé, les cyberattaques, etc.
Ainsi, pour se prémunir contre les risques de dysfonctionnement des secteurs vitaux et pour assurer la coordination et la cohérence des politiques publiques engagées, l’ITES recommande de mettre en oeuvre les trois actions suivantes :
- Premièrement, la mise en place de plans de continuité d’activité (PCA) efficaces, adaptés en permanence à l’évolution de la situation sanitaire et dotés d’une veille stratégique et d’un tableau de bord avec indicateurs d’alerte.
- Deuxièmement, le suivi et la mise en œuvre de ces plans de manière rigoureuse et prospective pour ne tolérer aucun dysfonctionnement, et ce, en les calibrant à 200%. Une stratégie de communication de crise intégrant le rôle fondamental des médias devra également être établie.
- Troisièmement, le Conseil national de sécurité, sous la présidence du Chef de l’Etat, pourrait être le garant suprême de la bonne mise en œuvre de ces plans stratégiques destinés à assurer la sauvegarde des secteurs vitaux. Les plans d’action avec indicateurs de suivis et tableau de bord devront lui être présentés de manière régulière afin de contrôler leur bonne mise en œuvre.
Une stratégie pour le redémarrage de l’économie consistant à préparer le redémarrage de l’économie. L’étude recommande l’élaboration d’une stratégie à l’horizon fin 2020 préparant le retour du fonctionnement normal de l’économie nationale sur fond de réforme de l’Etat en exploitant la crise du Covid-19 pour accélérer la transformation de l’Etat vers ce qu’on a appelé le « mieux d’Etat ».
Durant cette phase, il est crucial de mettre en place une stratégie permettant de se prémunir contre tout effondrement du tissu économique et industriel du pays, de la filière agricole et des industries agroalimentaires mais aussi contre des crises ou des révoltes sociales. L’étude recommande, pour cette phase, de se doter des moyens et des compétences octroyant à la Tunisie une autonomie stratégique dans des secteurs jugés vitaux.
Par ailleurs, il faut redéfinir la place de la Tunisie dans un monde profondément “bouleversé et reconfiguré” sur les plans sécuritaire et économique devra alors s’effectuer.
L’après-Covid-19 à l’horizon 2025 pour penser et anticiper la nouvelle grammaire stratégique ainsi que les déterminants géoéconomiques dans le nouveau contexte mondial où “les cartes de la puissance et du pouvoir à l’échelle de la planète vont être rebattues sur fond d’une reconfiguration des rapports de force et de puissance”.
A ce stade, il s’agit de se focaliser sur plusieurs problématiques d’ordre économique, social, politique et géopolitique qui incitent à conceptualiser les transformations que le pays devrait réaliser sur le moyen terme.
Parmi les problématiques auxquelles il faut réfléchir, l’étude cite: le système sanitaire post-Covid-19 à l’horizon 2025, le modèle numérique et digital pour la Tunisie post-Covid-19 à l’horizon 2025, la démarche en matière de réforme de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, l’agriculture à l’horizon 2025, le contrat social à l’horizon 2025 et le repositionnement diplomatique international de la Tunisie.
Suite à des séances de brainstorming menées par les équipes de l’ITES,
10 secteurs vitaux jugés indispensables à la survie de la nation ont été identifiés qui tiennent lieu de composantes de l’économie de guerre :
1- La filière hospitalière et plus globalement sanitaire incluant l’industrie pharmaceutique (matériel, médicaments, etc.) : elle constitue la première ligne de défense du pays face au Covid-19.
2- La sécurité des personnes, des biens et des infrastructures critiques du pays (à titre illustratif : centrales électriques, hôpitaux, minoteries, centres de distribution, etc.) : stratégie mobilisant les forces de sécurité intérieure et l’armée nationale.
3- Les services publics vitaux à l’attention des citoyens : l’eau, l’électricité et le gaz, les services municipaux de collecte et de gestion des déchets, les télécommunications et l’internet
4- Les hydrocarbures
5- Assurer le paiement des salaires et retraites en temps voulu et limiter au maximum les licenciements et fermetures d’entreprises
6- La filière agricole et agroalimentaire avec un accent particulier sur la filière céréalière
7- L’approvisionnement de la population en denrées de base vitales afin de se nourrir sans aucune discontinuité
8- Veiller à entraver toute dérive non contrôlée des acteurs relevant de l’économie informelle. Une attention particulière devra être accordée aux régions frontalières vivant des trafics aujourd’hui entravés du fait de la fermeture des frontières
9- Sécuriser et assurer le transport et la logistique des matières et produits vitaux : circuits d’approvisionnement
10- Mobiliser l’ensemble des capacités et acteurs du pays en termes d’innovation, de développement d’outils fondés sur l’intelligence artificielle, le Big Data, etc. Oeuvrer très rapidement à la digitalisation de l’administration tunisienne. |